Parmi les fondamentaux de l’analyse financière, le bilan comptable occupe une place de choix. Savoir le lire et l’interpréter vous aide grandement à échanger avec votre expert-comptable, mais surtout avec votre banquier.
Par expérience, nous nous rendons compte que beaucoup de personnes confondent le bilan avec l'ensemble des comptes annuels de l'entreprise (Bilan + Compte de Résultat + Annexe et liasse fiscale). Nous verrons ensemble que le bilan est un des éléments qui composent les documents comptables obligatoires. Et qu'il concerne uniquement la partie patrimoniale de l'entreprise.
Ce guide est très complet. Vous pouvez le consulter de A à Z pour vous former sur le bilan comptable. Ou vous focaliser sur certains points précis. Aussi, nous vous conseillons de l’enregistrer dans vos favoris, pour l’avoir sous la main en cas de besoin 😉.
Au niveau du plan, nous définirons d’abord la notion de bilan comptable et passerons en revue les objectifs qu’il poursuit pour chaque entreprise. Vous y découvrirez aussi un mode d’emploi détaillé, afin de comprendre la composition de l’actif et du passif du bilan. Enfin, nous vous donnerons des clés pour l’analyser correctement et pour l’établir au bon moment.
Document financier phare parmi les états financiers d’une entreprise, le bilan impressionne un peu. Ses tableaux normés comportent des colonnes appelées « actif » et « passif », deux termes fondamentaux à retenir.
Photographie réalisée à une date précise, le bilan actif et passif présente la situation patrimoniale d’une société à un instant T. La date correspond en général au dernier jour de votre exercice comptable. Toutefois, en s’organisant, il est possible de prendre un cliché instantané d’un bilan comptable à toute autre date de l’année.
La lecture de ce document permet de visualiser à l’actif, les emplois. Il s’agit notamment de vos investissements : ce que vous possédez. Immobilisations, stocks, créances et disponibilités bancaires en font partie.
Au passif sont présentés l’endettement ainsi que vos ressources détenues en propre.
Autant le bilan est un cliché du jour de la clôture de l’exercice comptable, autant le compte de résultat ressemble, lui, à un film. Ce dernier reprend toutes les données de l’activité - comme les achats et ventes - et qui sont intervenues au cours de la période. Ce déroulé de la vie de l’entreprise, digne d’un storytelling, permet de conclure en dégageant un bénéfice ou une perte : le résultat.
Le bilan présente à son passif, dans les capitaux, ce montant de résultat obtenu sur l’exercice. Cependant, il ne donne aucun détail quant à sa composition. L’approche bilancielle est purement patrimoniale.
Comme présenté dans le premier schéma simplifié d’un bilan comptable ci-dessus, le total du bilan est toujours parfaitement égal à celui du passif. L’ensemble des emplois à l’actif, de vos biens donc, se finance par des ressources, le passif. Qu’il s’agisse de dettes ou de vos propres deniers, le total de vos ressources correspond au total de vos emplois.
Dirigeant ou travailleur indépendant, vous ne pouvez pas passer à côté du bilan comptable. Il fait partie des documents de synthèse essentiels qui vous suivent souvent partout. Voyons dans quels cas de figure concrets il s’avère incontournable et pour quelles raisons.
Pour commencer, sauf si vous êtes auto-entrepreneur, dès lors que vous exercez une activité à votre compte, le bilan comptable s’impose. Cette obligation est inscrite au Code de commerce pour les commerçants. Les artisans et professions libérales sont également concernés. En entreprise individuelle ou en société, tout professionnel hors micro entrepreneur doit établir une comptabilité complète avec bilan, compte de résultat et annexe. En cas de régime réel simplifié, les textes admettent une présentation allégée.
Notez aussi que la liasse fiscale à préparer pour l’administration comprend bien le bilan comptable. Finalement, ce document répond à une double obligation légale. Mais il ne faut pas confondre le bilan comptable (actif + passif de l'entreprise) avec l'ensemble de la liasse fiscale (Bilan + Compte de Résultat + Annexe). C'est malheureusement une confusion assez courante dans le langage courant.
Le bilan comptable ne constitue pas un document à conserver uniquement sur sa table de chevet. Destiné à donner une vue exhaustive de la situation patrimoniale d’une entreprise, il intéresse d’autres acteurs de la vie de votre société. Bien sûr, tous les associés au capital accèdent à cette information comptable.
Parmi les tiers, le banquier et la Banque de France arrivent en premier. Sans documents comptables annuels, vous ne pouvez pas obtenir de crédit auprès d’un établissement financier traditionnel.
Vous recherchez des investisseurs ? Le bilan reste un incontournable pour l’analyse de votre dossier.
Et n’oublions pas les tiers comme les compagnies d’assurances crédit, les cas d’appel d’offres, etc.
Maintenant que vous entrevoyez en quoi consiste un bilan comptable, nous allons approfondir un peu l’approche. Plusieurs formes de bilans cohabitent, toutes basées sur la comptabilité de l’entreprise.
Le bilan fonctionnel s’utilise en analyse financière afin de comprendre comment se financent les investissements durables, mais aussi le cycle d’exploitation. Comme son nom l’indique, il présente les postes d’emplois et de ressources selon leurs fonctions :
Voici un schéma de bilan fonctionnel à titre d’exemple :
Ce sont les banques et investisseurs qui utilisent essentiellement ce type de document. Ces organismes analysent votre bilan comptable sous un angle particulier. Des reclassements et retraitements de certains postes permettent de présenter les données selon :
Les établissements qui examinent vos demandes de crédit cherchent à comprendre si vous disposez de la capacité à rembourser vos dettes et sous quel délai. Ainsi, l’analyse de la solvabilité et de la liquidité constitue le principal objectif du bilan financier.
Une autre variante, le bilan prévisionnel, s’utilise dans le cadre de projets de croissance ou d’un business plan. Destiné à visualiser la situation patrimoniale future de votre entreprise, il ne découle pas des comptes annuels. Sous forme de tableaux de l’actif et du passif également, le bilan prévisionnel se travaille à partir des hypothèses chiffrées dans le BP.
Entrons maintenant dans la composition détaillée d’un bilan comptable. Comme évoqué, les postes de l’actif et du passif s’équilibrent. Commençons par les éléments qui figurent sur le tableau actif.
Le premier poste en haut du bilan actif correspond aux immobilisations. Se classent ici toutes les acquisitions à caractère durable pour l’entreprise. Elles se décomposent en trois catégories :
Le nom de cet emploi comptable parle de lui-même. Quand vous investissez, c’est pour la durée, contrairement à des achats consommables de matières ou des prestations de services ponctuelles. Aussi, le coût de l’immobilisation est porté au bilan et non pas au compte de résultat.
Le bilan comptable décompose l’actif immobilisé en 3 groupes d’immobilisations :
Si vous observez vos documents annuels de près, vous remarquez que le tableau de l’actif du bilan comptable comporte 3 colonnes :
Avec le système des amortissements comptables, si le bien se déprécie dans le temps, vous étalez la charge sur plusieurs années. Une quote-part de la valeur brute de chaque immobilisation (le prix d’achat en général) est enregistrée au compte de résultat tous les ans. Ainsi, vos investissements ne pèsent pas sur le résultat immédiat. Ces amortissements viennent se positionner à l’actif du bilan comptable. Ils se déduisent de la valeur brute afin de disposer de l’actif net immobilisé.
Les terrains ne se déprécient pas normalement donc ils ne sont pas amortissables. Il en va de même pour toutes les immobilisations financières. En les revendant, vous pouvez potentiellement récupérer votre mise de départ. Toutefois, si des évènements font craindre un risque de perte, la réglementation comptable vous autorise à baisser leur valeur au bilan. On parle alors de provisions pour dépréciation. Elles se positionnent dans la même colonne du tableau que les amortissements, afin de disposer des immobilisations nettes.
Tous les achats consommables et stockables se positionnent sur cette ligne. Ce sont les fournitures et matières premières que vous utilisez dans vos process de fabrication et qui à date ne sont pas encore utilisées.
Se classent aussi en stock les produits finis non vendus aux clients. Tous ces biens possèdent donc une valeur marchande. Ils se valorisent au bilan à leur prix de revient.
S’ils présentent un risque de dévalorisation, vous constituez par prudence une dépréciation en colonne « amortissement et provisions ». Ainsi, le stock net correspond au stock brut, diminué des provisions.
Le poste suivant du bilan comptable correspond à toutes les sommes que vous êtes en droit de recouvrer auprès :
Les factures de vente TTC demeurent à l’actif en attendant leur règlement. Pour les créances fiscales, notons principalement la TVA déductible sur les achats ou le crédit de TVA le cas échéant.
Comme pour les autres actifs immobilisés ou circulants (stocks), en cas de risque sur la valeur de ces montants, le principe de prudence s’applique. Dans ce cas, la provision pour dépréciation apparaît au bilan dans la colonne du milieu de tableau. Elle vient en minoration de la créance brute. Vous obtenez ainsi la créance nette.
Le bilan comptable présente en bas du tableau de l’actif les postes de trésorerie « positifs », c’est-à-dire l’argent réellement disponible à la banque. Il s’agit donc des comptes courants créditeurs du point de vue de la banque, des placements, ainsi que des espèces en caisse.
Si votre compte est à découvert, il ne constitue pas un actif, mais un passif (une dette financière). Les différents comptes bancaires se positionnent soit en trésorerie à l’actif, soit en dettes financières au passif. Ils ne se compensent pas.
Après l’actif et les emplois, voici le passif du bilan comptable : les ressources.
Oui, il faudra vous y faire, une dette constitue bien une ressource. Car tant que les factures et le crédit demeurent dus, c’est autant de trésorerie que vous ne sortez pas de votre entreprise. Elle reste donc une ressource, tout comme votre capital 💡.
Le premier poste en haut du tableau du bilan passif correspond aux capitaux qui vous appartiennent personnellement. C’est le signe de votre autonomie financière, quand on les compare aux dettes. La gestion de la croissance exige souvent de disposer de fonds propres corrects si vous souhaitez obtenir un crédit bancaire. Entrons dans le détail des principaux éléments qui les composent.
Quand vous constituez votre société, le capital social correspond à la mise de départ des associés en fonds propres. Selon le statut juridique, on parle de parts sociales ou d’actions.
Pour une entreprise individuelle, cette notion n’existe pas. Dans ce cas, l’argent que vous injectez à la création - ou que vous laissez ensuite dans l’entreprise - figure en fonds propres, au poste appelé « compte individuel » ou « compte de l’exploitant ».
Au fur et à mesure des années, la gestion de l’entreprise aboutit à constater des résultats bénéficiaires ou déficitaires. Selon votre activité et vos projets de croissance, conserver les bénéfices à l’intérieur de la société peut s’avérer utile, voire indispensable. Dans ces cas, les résultats non distribués aux actionnaires ou non retirés par l’exploitant individuel viennent se positionner sur les lignes de réserves.
La loi impose la constitution de la réserve légale voire de certaines réserves réglementées. Au-delà de ce niveau incontournable, on parle de réserves facultatives.
C’est sur cette ligne qu’apparaît le solde du compte de résultat : bénéfice ou déficit. L’année suivante, le poste est remis à zéro, car le résultat de N-1 fait l’objet d’une affectation par l’assemblée générale, soit en réserves, en report à nouveau ou en dividendes.
Il enregistre les déficits des années précédentes et présente donc la particularité de figurer en négatif dans le tableau passif du bilan comptable. Il s’apure par l’affectation des bénéfices des années suivantes.
Après les fonds qui vous appartiennent en propre, le bilan comptable présente ensuite les dettes financières, quelle que soit leur exigibilité (court, long ou moyen terme).
D’autres tableaux dans les annexes aux comptes annuels permettent de connaître la répartition de l’endettement par échéance.
Avec ces informations, vous pouvez procéder au calcul des capitaux permanents, soit l’addition des fonds propres et de l’endettement financier à plus d’un an.
C’est une source classique de financement des entreprises. Le capital restant dû à la date de clôture figure sur cette ligne du bilan. Il s’agit essentiellement :
Ils figurent sur la ligne du tableau appelée « emprunts et dettes financières divers ». Les associés peuvent ainsi aider au financement de l’entreprise. Ils reçoivent une rémunération en contrepartie. Parfois, les sommes sont bloquées pour une certaine durée définie dans une convention ad hoc.
C’est une manière de renforcer les fonds propres : on parle de « quasi-fonds propres ». Par exemple, c’est une sécurité pour une banque qui prend le risque de prêter à une entreprise.
Les comptes bancaires présentant des découverts figurent aussi sur la ligne « emprunts et dettes auprès des établissements de crédit ». Attention, pour l’analyse financière du bilan comptable, lire l’annexe s’avère indispensable. En effet, ces sommes n’ont pas le caractère de ressources durables et permanentes pour l’entreprise. Leur échéance est à moins d’1 an.
Dans ce poste du bilan comptable, vous retrouvez les dettes relatives à l’exploitation de l’entreprise. On parle ainsi de passif circulant, car ces éléments se soldent avec les paiements et se renouvellent avec les achats. Ils circulent.
Toutes les factures restant dues figurent sur la ligne « dettes fournisseurs et comptes rattachés ». Plus vous réglez tard ces éléments, plus vous conservez le cash. Veillez toutefois au respect des échéances afin d’éviter les pénalités.
Ce poste du bilan comptable comprend également toutes les charges à payer pour lesquelles les factures ne sont pas parvenues à la date de la clôture. Ce sont des estimations, afin de rattacher la charge et la dette à l’exercice qui les concerne.
Les salaires, charges sociales, impôts dus et la TVA à reverser figurent sur cette ligne de vos comptes annuels. Tous les coûts relatifs à l’exercice sont intégrés au bilan. Comptabilisez ainsi des provisions pour charges à payer, comme pour les congés payés ou les primes sur le résultat annuel.
Maintenant que vous maîtrisez la composition du bilan actif comme passif, voici le moment de l’analyse. Sans être expert-comptable ni expert en finance, avec quelques réflexes, vous saurez lire et interpréter un bilan d’entreprise selon l’axe patrimonial.
Avec les explications précédentes, les notions d’emplois et ressources durables ou stables vous semblent désormais familières. Vous comprenez aussi ce qu’est un actif ou passif circulant. Vous maîtrisez le calcul des capitaux permanents. Et vous savez que l’actif est égal au passif.
La comptabilité s’effectue en partie double, ce qui signifie en résumé que toute écriture affecte 2 postes comptables à chaque fois. Par exemple, une facture fournisseur s’impute :
La vente de vos produits impacte le chiffre d’affaires au compte de résultat ainsi que le poste client au bilan. Avec ces données de base, vous comprendrez bientôt que la comptabilité est une réelle gymnastique 🤸♂️. Entraînez-vous !
Voici les éléments essentiels à maîtriser. Surtout si vous devez échanger avec les banquiers, dans le cadre d’un projet de croissance exigeant d’emprunter pour financer vos investissements.
L’excédent de capitaux permanents qu’il vous reste quand tous les actifs immobilisés sont couverts s’appelle le fonds de roulement. Si le calcul aboutit à un montant négatif, vous devez piocher dans vos ressources à court terme pour le solde. Il est conseillé de disposer d’un FR positif. Il sert alors à financer en partie l’exploitation, donc le BFR.
Le besoin en fonds de roulement (BFR) est la différence entre les actifs circulants et les dettes circulantes. C’est le niveau de cash nécessaire pour faire tourner votre activité au quotidien.
Voici en synthèse l’essentiel à retenir :
Utilisés principalement par les banquiers, les ratios de solvabilité et de liquidité mesurent votre capacité à faire face à vos dettes avec vos actifs. Parmi les différents indicateurs, nous vous en recommandons deux.
Les banques traditionnelles recommandent au minimum 20 %.
Avec un indicateur supérieur à 1, vous montrez votre capacité à faire face aux dettes d’exploitation en recouvrant vos créances clients et en vendant vos stocks.
Vous rencontrerez en général le ratio d’indépendance financière. Il mesure l’équilibre entre les ressources permanentes ou durables qui vous sont propres et celles qui correspondent à un endettement à long terme.
Si ce ratio d’indépendance dépasse les 50 %, la structure de votre bilan comptable est équilibrée.
Le bilan comptable peut être réalisé à tout moment en cours d’exercice. Toutefois, sa préparation exige de passer de nombreuses écritures spécifiques. Aussi, c’est en général à la date de clôture qu’il s’établit. Votre comptable peut avoir besoin de plusieurs semaines pour le finaliser.
Sauf l’année de création de votre entreprise, la durée de l’exercice comptable s’élève à 12 mois. C’est la période sur laquelle sont enregistrés en comptabilité les charges et produits, ainsi que les recettes et dépenses. C’est donc la durée du film, avant de prendre la photo finale que constitue le bilan comptable.
Le choix de la date de clôture demeure libre sauf pour les professions libérales. Souvent, l’exercice se confond avec l’année civile. Mais ce n’est pas une obligation.
La loi impose à tous les professionnels (en dehors des autoentreprises) d’élaborer un bilan comptable, un compte de résultat et des annexes pour chaque exercice. Selon la forme de la société, les textes réglementent la manière et les délais pour établir les comptes annuels.
En outre, le bilan comptable ainsi que les autres documents de synthèse doivent faire l’objet d’une approbation par l’assemblée générale dans les 6 mois après la date de clôture.
De toute façon, si les délais autorisés sur le plan juridique ne sont pas dépassés, vous pouvez être rattrapé par vos obligations fiscales. Ce sont même elles qui donnent le la pour les entreprises qui traînent.
Ainsi, le bilan comptable figure dans la liasse fiscale que vous devez déposer début mai pour les exercices clos au 31 décembre. Vous avez choisi une autre date ? La loi fiscale impose alors de restituer la liasse avant le 15e jour qui suit le troisième mois après la date de clôture.
Ne tardez pas pour faire établir votre bilan comptable. Si votre cabinet vous réclame les factures ou justificatifs manquants pour boucler le dossier, c’est surtout pour vous !
En effet, disposer de ses résultats financiers tôt permet de réagir rapidement. Si votre bilan comptable se clôture le dernier jour autorisé par la loi, plusieurs mois se sont alors écoulés depuis la date de sa photo. Elle ne reflète déjà plus la réalité de votre entreprise.
Finalement, tout se tient.
La comptabilité est une affaire de logique avant tout.
En faisant vôtres les préceptes de base d’un bilan comptable, vous progressez grandement dans la lecture des équilibres financiers. Les informations issues des enregistrements comptables s’organisent à l’actif comme au passif selon une dizaine de grands postes.
Solvabilité, liquidité, fonds de roulement, besoin en fonds de roulement et trésorerie n’ont alors plus de secret pour vous.